L’Histoire derrière l’histoire Reportage sur l’impact de la COVID-19 sur les producteurs maraichers de Bagré et Loumbila (Burkina Faso)

Mon reportage sur l’impact de la COVID-19 sur les producteurs maraichers de Bagré et Loumbila (https://www.sidwaya.info/blog/2020/06/18/maraichage-a-bagre-et-a-
loumbila-les-cris-de-detresse-des-producteurs/ ) est tombé comme un cheveu dans la soupe. Car, il n’était pas dans mon agenda. Initialement j’avais un projet de reportage sur la pêche artisanale comme source d’emplois pour la jeunesse rurale de ces deux localités (https://www.sidwaya.info/blog/2020/06/09/peche-artisanale-une-pourvoyeuse-demplois-peu-valorisee/ ) au mois de mars 2020. Quelques jours avant le voyage sur le terrain, les premières mesures gouvernementales pour endiguer la pandémie tombent. La capitale Ouagadougou et d’autres grandes villes sont mises en quarantaine.

Lorsque je me préparais à nouveau à partir sur le terrain après la levée des mesures restrictives, une idée m’a traversé l’esprit (peut-être le flair journalistique !) : « pourquoi ne pas profiter de cette sortie en milieu rural pour mettre en relief l’impact de cette crise sanitaire mondiale sur production agricole de contre-saison dans ces deux localités, qui font partie des grandes zones de productions maraichères du pays ». Je partage le projet avec un doyen de la rédaction qui reconnait sa pertinence et me prodigue ses conseils. Un tour d’horizon sur la couverture de l’impact de la maladie à coronavirus me réconforte davantage. En effet, durant ces deux premiers mois de l’apparition de la covid-19 au Burkina Faso, les médias locaux ont jeté leur dévolue sur les conséquences de la maladie sur l’économie urbaine. Dans la même tendance, j’avais produit un petit reportage sur l’impact de la pandémie sur les boulangeries et les pâtisseries de la capitale (https://www.sidwaya.info/blog/2020/04/06/covid-19-la-traversee-du-desert-des-boulangers-et-patissiers/ ). Les conséquences de la pandémie sur l’économie agricole rurale étaient rarement présentes dans l’agenda médiatique.

Il ne fallait donc pas rater cette occasion de toucher du doigt ce que les agriculteurs, en l’occurrence les producteurs maraichers de l’intérieur du pays vivent comme difficultés liées à cette crise sanitaire mondiale qui a subitement et drastiquement restreint l’accès aux marchés. Surtout que ce n’est pas tous les jours que l’on a les moyens pour effectuer des missions de reportage dans le pays profond.

Un confrère d’une radio locale à Bagré et le correspondant de Sidwaya à Ziniaré ont été d’un grand apport dans la préparation de la mission, notamment dans la mise en contact avec les maraichers. Je profite rendre hommage au confrère de Ziniaré, Abdias Cyprien Sawadogo, décédé deux mois après la publication du reportage.

Dans la préparation de mes reportages, je mets un accent particulier sur le mapping des acteurs clés du sujet. L’identification et la diversification des sources deviennent alors une étape cruciale. Car, pour moi, la qualité d’une production journalistique repose sur la consistance de son contenu, qui est tributaire de la qualité des sources, mais aussi de la capacité du journaliste à faire parler ses sources, à les amener à se vider ! La qualité du style rédactionnel vient en second
plan, en appui au contenu.

Sur le terrain, j’ai trouvé des producteurs qui avaient gros sur le cœur, non seulement par rapport aux conséquences désastreuses de la maladie sur leurs revenus mais aussi aux récurrents problèmes d’absence d’infrastructures de conservation de leurs productions, de régulation du marché. Le désir ardent de ceux qui se définissent comme des laissés-pour-compte d’exprimer leur ras-le-bol a facilité notre travail sur le terrain. Des laissés-pour-compte, pas seulement des
pouvoirs publics, mais aussi des médias. Les productions médiatiques, qui font toujours une part belle à l’actualité politico-urbaine, ne confèrent pas la place qu’il mérite à ce monde paysan rural qui représente pourtant plus de 70% de la population burkinabè.

Sur le terrain, ratisser large, collecter le maximum d’informations devient un impératif, un principe qui m’est cher. Mais pas sans perdre de vue le colossal et fastidieux boulot d’organisation, de construction, d’ordonnancement de la multitude de données recueillies qui vous attend. Cette étape est centrale pour la mise en musique des sons souvent discordants recueillis çà et là. J’y investis toute mon intelligence et mon énergie. Car, cet exercice réussi, le reste, surtout la
rédaction du papier coule comme l’eau de roche.

La principale difficulté que j’ai rencontrée est relative à la question du temps. Pour un délai de 48 heures, initialement pour réaliser un seul reportage, il faut jongler dans le même timing pour réaliser le second reportage, surtout dans deux localités distantes de plus de 200 km. La collecte des informations, les rendez-vous s’exécutent alors au pas de course ! Et comme d’habitude, quand je m’engage dans un reportage, j’y mets tout mon cœur !

Ce reportage a renforcé mon engagement à mettre le monde rural au centre de mes productions. Et voir que c’est un reportage sur ce monde paysan qui m’a valu ce prestigieux prix, mon premier à l’international dans ma jeune carrière de journaliste, m’a énormément fait du bien !

Mahamadi SEBOGO
Windmad76@gmail.com

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